De mal en pis: l'escalade de la violence
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L'objectif de la violence conjugale est de gagner puis de maintenir le pouvoir dans la relation. Évidemment, cette dynamique ne s’installe pas du jour au lendemain. La violence entre partenaires intimes tend plutôt à s’installer graduellement et à augmenter avec le temps.
L’amour comme cheval de Troie
Au début de la relation, le partenaire démontre son affection, son intérêt, sa patience, sa douceur, son ouverture, sa générosité, etc. Malheureusement, ces manifestations d’amour ne sont pas entièrement authentiques et désintéressées comme ce serait le cas dans une relation saine, mais ont plutôt comme objectif de préparer le terrain pour installer une emprise. Il s’agit donc déjà d’une forme de violence psychologique et certains utilisent même le terme love bombing pour décrire cette technique de manipulation par la séduction. Par la suite, le fait que la victime ait déjà connu son partenaire sous ce meilleur jour contribuera à nourrir son espoir tout au long de la relation et à la maintenir dans la relation.
La recherche de zones sensibles
En favorisant l’attachement et l’investissement dans la relation, le partenaire fait en sorte que la victime s’ouvre à lui. Elle se confie, elle parle de ses rêves, de ses peurs, de ses regrets, de ses échecs... et le partenaire gagne ainsi accès à toute l’information nécessaire pour prendre du pouvoir. Il connaît ses fragilités, ses difficultés et ses vulnérabilités et est alors en mesure de choisir des zones sensibles comme cible pour construire son emprise.
Lentement mais sûrement : la construction de l’emprise
L'agresseur commence, tout doucement, à «forcer» les limites de sa partenaires et à la remettre en question pour la mettre en état de déséquilibre intérieur et commencer à prendre du pouvoir dans la relation. Par exemple, un partenaire qui sait que sa victime est sensible au rejet pourrait utiliser des tactiques de distance ou de silence lorsqu’il veut obtenir quelque chose. S’il sait qu’elle est insécure face à son poids, il pourra utiliser des regards «lourds» ou faire des remarques négatives au sujet du poids d'autres personnes. S’il sait qu’elle est gênée, il pourrait passer volontairement des commentaires à son sujet devant des amis pour amplifier son malaise. Comme il cible des zones très sensibles, il peut utiliser des comportements violents très subtils, mais qui seront tout de même efficaces pour que la victime soit affectée. Évidemment, la relation est également caractérisée par les hauts et les bas du cycle de la violence et la victime est de plus en plus blessée par la violence qu’elle subit, ce qui contribue aussi à la construction et au maintien de l’emprise du partenaire.
L’intensification au fil de l’engagement
Quand la relation commence à être plus sérieusement investie par la victime, au fil de différents évènements qui marquent l’engagement (faire des promesses d’éternité, s'afficher publiquement comme couple, avoir des projets à long terme, aller vivre ensemble, déménager pour suivre le partenaire, acheter une voiture ou une maison, se fiancer, se marier, avoir un enfant, etc.), la violence augmente souvent de façon plus marquée et devenir subitement plus intense et plus fréquente.
Le partenaire se permet d’utiliser une violence plus manifeste, parce qu’il devient de plus en plus difficile pour la victime de rompre la relation. Les pressions indues deviennent des règles puis des obligations, les sous-entendus se transforment en insultes ou en menaces, les regards noirs deviennent des empoignades, les mots durs deviennent des cris puis des coups, etc. C’est d'ailleurs souvent au moment d’une grossesse ou de l’arrivée d’un enfant, un moment qui marque l'engagement de façon indélébile, que la violence physique fait son apparition.
Jusqu’au meurtre ?
La violence conjugale peut aller très loin, jusqu'à des formes de violence qui mettent la sécurité et même la vie de la victime en péril. Cependant, comme il s'agit d'une problématique instable et imprévisible, on ne peut pas prédire jusqu’où la violence peut aller dans une relation donnée. On ne peut pas non plus présumer que la situation est encore relativement «sécuritaire» si la violence n’a jamais encore été physique, parce que l’escalade peut se produire très graduellement, comme elle peut se produire tout d’un coup. On sait cependant qu’un facteur est particulièrement propice à une escalade subite: lorsque la victime remet la violence ou la relation en question. C’est pourquoi il est de loin préférable qu’une rupture en situation de violence conjugale soit préparée plutôt que précipitée, et qu’il est essentiel de respecter les décisions de la victime quant au rythme de la rupture.
Le piège de la vision à posteriori
Lorsqu’une victime examine sa relation à posteriori, lorsqu'elle consulte une intervenante par exemple, elle arrive souvent assez facilement à identifier la violence subtile et la manipulation qu’elle a subies dès le début de la relation. Elle risque alors de ressentir de la honte et de la culpabilité de n'avoir pas réalisé le piège qui se dessinait autour d'elle ou de ne pas avoir réagi assez vite. Ça peut être très souffrant, d'autant plus que c'est l'un des préjugés les plus fréquents lorsqu'on parle de violence conjugale : «Moi, je n'aurais jamais accepté ça!»
On peut alors aider la victime à réaliser qu'il lui aurait été extrêmement difficile, voire impossible, d’identifier la violence conjugale au début de sa relation, puisque les comportements de violence subtile étaient habilement camouflés à travers des manifestations d’amour. Ce n’est que le fait de connaître la suite des choses qui lui permet aujourd’hui de voir plus clairement la violence psychologique et la manipulation des débuts de la relation.
Il est aussi important de lui rappeler que c'est normal (et sain) d'avoir cru en la bonne foi de son partenaire, de lui avoir accordé le bénéfice du doute, d'avoir accepté ses excuses et d'avoir cru en lui et en son potentiel de changement. C'est l'agresseur qui choisit d'utiliser les qualités d'ouverture et de confiance de la victime contre elle... et il demeure donc le seul responsable de la dynamique de violence conjugale.
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