Renforcer sa sécurité : Stratégies concrètes pour protéger son intégrité physique dans un contexte de violence conjugale
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Cet article explore différents enjeux liés à la protection de son intégrité physique et à la réduction des risques liés à un partenaire ou à un ex-partenaire violent. Des articles différents explorent d'autres aspects liés à la sécurité en contexte de violence conjugale : la construction de scénarios de protection personnalisés, la protection face à la violence technologique, les stratégies de protection spécifiques au moment d’un départ et les façons de protéger ses milieux de vie suite à une rupture. Ces articles sont disponibles au bas de cette page.
Important : Les stratégies présentées dans cet article ne sont pas toujours appropriées dans toutes les situations et il importe de suivre son instinct sur ce qui est utile et sécuritaire ou non pour soi-même. Dans l’idéal, ces propositions seraient adaptées à chaque situation particulière dans le cadre de l’élaboration de scénarios de protection personnalisés, construits avec l’aide d’une intervenante spécialisée en violence conjugale.
Si on a subi un étranglement ou des coups à la tête, consulter un médecin en urgence
L’étranglement est un acte extrêmement dangereux qui compromet la respiration (que ce soit totalement ou partiellement) et peut bloquer l'apport sanguin au cerveau en compressant les artères jugulaires. Le danger pour la sécurité et la vie, peut persister pendant des heures, voire des jours, après l'incident, quelle que soit la manière dont l'étranglement a été effectué :
- Un étranglement au niveau du cou avec les mains, un corps-à-corps, ou un lien, y compris les étranglements survenant dans le cadre d'activités sexuelles, qu'elles soient consenties ou non.
- Un étouffement à l’aide d’un objet, d’un oreiller, de la main, ou de tout autre objet obstruant la bouche ou le nez.
- Une strangulation ou compression des vaisseaux sanguins des deux côtés du cou, même si la personne a pu respirer, parler ou crier pendant l'incident.
- Le fait d'être écrasée par le corps de l'autre, rendant la respiration difficile.
Les coups à la tête posent également des risques à court terme (commotions cérébrales) et à long terme (traumatismes cranio-cérébraux - TCC) peu importe leur forme :
- Chocs directs ou indirects à la tête.
- Répétition de petits coups à la tête.
- Chutes causées par la violence physique.
- Avoir été secouée.
Compte tenu des risques, on suggère fortement de consulter un médecin très rapidement dans tous les cas d’étranglement ou de coups à la tête.
Si on a subi une agression sexuelle, consulter un Centre désigné en agression sexuelle
Les agressions sexuelles demeurent très fréquentes en contexte de violence conjugale. Elles ont d’importantes répercussions au niveau physique et psychologique. Il existe des services disponibles 24/7 lorsqu’on a subi une agression sexuelle et qu’on a besoin de services pour sa santé physique, pour sa santé psychologique et pour recueillir les preuves nécessaires si on souhaite éventuellement porter plainte pour l’agression sexuelle. Dans l’idéal, on se rend au Centre désigné en agression sexuelle le plus rapidement possible après une agression, sans changer ses vêtements ou prendre une douche.
Pour être dirigée vers le Centre désigné de sa région, on peut contacter Info-aide violence sexuelle 24/7 au 1 888 933-9007.
Connaître les fonctionnalités d’urgence de son cellulaire ou de sa montre intelligente
Les téléphones cellulaires offrent différentes options permettant de passer rapidement un appel au 911, comme une combinaison de touches facilement accessibles ou un raccourci direct sur l'écran principal. Certains appareils ou applications permettent également de configurer une fonction de sécurité pour envoyer automatiquement sa géolocalisation par message texte à des contacts de confiance, comme des membres de la famille ou des amis, que l'on aura préalablement enregistrés. Voici les liens pour savoir comment faire sur Apple, sur Android ou sur Google Pixel.
Dénoncer les infractions criminelles
De nombreux comportements de violence conjugale constituent également des infractions criminelles que l'on peut dénoncer aux policiers. Lorsqu’une plainte est retenue, l’agresseur est assujetti à différentes ordonnances judiciaires (de ne pas contacter la victime par exemple) en attendant son procès, qui se poursuivent ensuite si la personne est trouvée coupable, ce qui peut favoriser sa sécurité. On peut consulter l’article 13 questions sur le processus judiciaire criminel pour plus d’information à ce sujet.
Demander un engagement de ne pas troubler l’ordre public (communément appelé un «810 »)
Un « 810 » peut être ordonné quand une personne en craint une autre, même si elle n’a encore commis aucun crime ou encore si elle n’a pas été reconnue coupable des crimes qu’elle aurait effectivement commis. Cette ordonnance est prononcée par un juge lorsqu’il est convaincu que la victime a peur que l’agresseur lui fasse du mal à elle ou à sa famille, qu’il brise des choses qui lui appartiennent ou qu’il partage une image intime. Pour demander un 810, il faut s’adresser aux services policiers.
Rapporter les bris de condition
Que ce soit avant de comparaître en Cour criminelle, lorsqu’un 810 est en place ou suite à une libération conditionnelle, les agresseurs peuvent être soumis à des conditions comme celle de ne pas contacter sa victime ou de ne pas se retrouver dans certains lieux. Ces conditions sont mises en place pour protéger la victime d’une récidive. Le bris d’une condition entraîne des conséquences pour l’agresseur, qui devra répondre de cette nouvelle accusation devant la Cour. Pour que ces mesures soient efficaces, les bris de condition doivent être rapportés aux policiers systématiquement dans l'idéal.
Se protéger du danger posé par des armes à feu
Si un agresseur possède une arme à feu ou qu’il a la volonté (ou qu’il menace) de s’en procurer une, on peut contacter le Bureau du contrôle des armes à feu et des explosifs (BCAFE). Ce service permet de faire part de ses inquiétudes ou encore de signaler la situation de violence conjugale pour empêcher que l’agresseur obtienne un permis pour acquérir une arme. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait eu une plainte au criminel pour faire un signalement. On peut contacter le BCAFE au 1 800 731-4000.
Dénoncer anonymement les infractions criminelles commises par un agresseur dans un autre contexte que la violence conjugale
Dans certaines situations et pour toutes sortes de bonnes raisons, il peut être trop difficile ou dangereux pour les victimes de violence conjugale de signaler la violence criminelle dont elles sont victimes aux policiers, notamment si le partenaire est impliqué dans des activités criminelles hors de la relation. Il est alors possible de dénoncer les activités criminelles que son partenaire a pu faire, pour favoriser qu’une intervention policière puisse éventuellement avoir lieu et que le partenaire soit arrêté pour d’autres raisons que la violence conjugale. Pour le faire anonymement on peut contacter Échec au crime au 1 800 711-1800 ou en faire un signalement en ligne.
Faire des scénarios de sécurité avec ses enfants
Les enfants sont au coeur des situations de violence conjugale. Ils en sont co-victimes et peuvent être profondément affectés par la situation. Bien qu’on ne veuille pas responsabiliser les enfants pour la sécurité de la victime et toujours en tenant compte de leur vulnérabilité et de leurs besoins, différentes stratégies peuvent être mises en place pour favoriser leur sécurité :
- Apprendre aux enfants à composer le 911 et les encourager à le faire pour toute situation d’urgence.
- S’assurer que les enfants connaissent l’adresse civique de la maison, pour pouvoir en informer les services d’urgence au besoin. Si on est séparée, on peut préparer un aide-mémoire pour les enfants avec toute l’information nécessaire pour contacter les services d’urgence.
- Favoriser une vision positive des services policiers, afin que les enfants se sentent à l’aise de faire appel à eux.
- Expliquer aux enfants quoi faire en cas de violence, où se cacher, chez quel voisin se réfugier, comment et qui appeler à l’aide, etc.
- Préparer le lien vers des contacts de confiance sur les appareils électroniques des enfants, afin qu’ils puissent leur demander de l’aide au besoin.
- Préparer un plan d’évacuation de la Maison avec les enfants, à mettre en place en cas d’urgence.
- Dire aux enfants que lors d’un événement de violence, leur seule responsabilité est de se garder eux-mêmes le plus en sécurité possible et non d’intervenir. Insister sur le fait qu’on ne veut pas qu’ils s’interposent entre soi et l’agresseur.
Faire des scénarios de sécurité avec ses proches
Les proches (famille, amis, collègues etc.) peuvent également être impliqués pour favoriser sa sécurité. On peut :
- Convenir de codes avec des proches, pour demander qu’ils préviennent les services d’urgence ou pour demander leur aide.
- Planifier des contacts réguliers, et convenir de ce qui devrait être fait dans l’éventualité où on ne répondrait pas au moment convenu : se présenter au domicile, téléphoner au partenaire pour créer une diversion, appeler la police, contacter un autre proche, etc.
- Demander à son milieu de travail des moments de pause pour pouvoir communiquer avec des ressources d’aide de façon sécuritaire.
- Développer une procédure avec son milieu de travail pour confirmer qu’on est en sécurité dans le cas d’une absence non planifiée.
- Confier à des proches un document qui explique la violence que l’on subit afin qu’ils puissent demander de l’aide plus facilement en cas d'urgence, en leur expliquant dans quelles circonstances et comment s’en servir. Inclure l’identité de l’agresseur et l’information sur son véhicule et sa plaque d’immatriculation.
- Fournir à des proches l’information sur les services d’aide qu’on reçoit, dans une ressource en violence conjugale par exemple, afin que ceux-ci puissent se référer à son intervenante au besoin.
- Laisser une valise d’urgence chez ses proches ou au travail, en cas de départ précipité.
- Être accompagné de proches lors de contacts avec un ex-partenaire violent, lors d’échanges de garde, quand on va en Cour ou lors d’un déménagement par exemple (à moins que cela pose un danger pour ses proches).
- Dire aux proches que lors d’un événement de violence, il est préférable de contacter le 911 plutôt que de s’interposer entre soi et l’agresseur.
Se protéger du harcèlement
Il peut être utile de mettre en place différentes stratégies pour se protéger du harcèlement, particulièrement en contexte de violence post-séparation :
- Modifier ses habitudes et ses itinéraires régulièrement.
- Se munir d’une alarme personnelle.
- Parler au téléphone avec un.e allié.e lors de ses déplacements.
- Éviter de porter des écouteurs pour rester alertes à son environnement.
- Demander l’accompagnement d’une intervenante ou d’un proche lorsqu’on doit se rendre dans un lieu où se trouve l’agresseur (à moins que cela pose un danger pour ces personnes).
- Préparer ce qu’on pourrait dire ou faire pour favoriser sa sécurité dans l’éventualité où l’agresseur se présenterait effectivement à soi, en se rappelant qu’on a le droit de feindre, de mentir, de prétendre et de faire semblant de quelque chose si on sent que c’est la meilleure façon de se garder en sécurité.
- Documenter le harcèlement et conserver toute preuve pour pouvant éventuellement être utilisée dans le cadre d’un processus judiciaire criminel.
Prendre un cours d’autodéfense
Prendre un cours d'autodéfense peut offrir plusieurs avantages à une victime de violence conjugale ou post-séparation :
- Normaliser et valoriser les stratégies de défense qu’on a déjà mises en place et qui ont favorisé sa sécurité jusqu’à maintenant.
- Apprendre à crier et à se donner le droit de le faire lorsque cette stratégie nous apparaît utile pour se défendre.
- Acquérir des techniques concrètes et simples qui, en dernier recours, peuvent aider à se libérer de prises corporelles, à se défendre contre une agression physique, ou à désorienter un agresseur.
- Apprendre des techniques d'autodéfense qui permettent de se sentir plus en confiance et capable de réagir face à une situation menaçant sa sécurité.
- Améliorer sa capacité à réagir de manière stratégique plutôt que réactive.
- Retrouver une sensation de pouvoir sur sa propre sécurité et briser le sentiment d’impuissance associé à la violence conjugale.
Plusieurs types de cours d’autodéfense et d’arts martiaux existent et ils peuvent tous être utiles, mais les approches inspirées du Wen-Do sont souvent favorisées dans les situations de violence faite aux femmes. Au Québec, le Centre de prévention des agressions de Montréal se spécialise dans ce type d’ateliers, qui sont souvent remboursables par IVAC pour les victimes d’actes criminels.
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